Aide au développement
Interviews
08.10.09
Virgile Kikaya , Directeur du PADEMA Consulting et consultant en développement international
1. Qu’entendez-vous par efficacité de l’aide au développement ?
Actuellement, on parle beaucoup de l’efficacité de l’aide avec la Déclaration de Paris, le Forum de haut niveau d’Accra et même, plus récemment, avec la conférence de Kinshasa. C’est un concept qui date du début des années 2000. Il se base sur le constat selon lequel tous les programmes d’aide antérieurs n’avaient pas porté les fruits escomptés. D’où, les pays pauvres s’appauvrissaient davantage. Il était donc nécessaire de revisiter les mécanismes d’appui au développement surtout avec les objectifs du millénaire qui devaient être atteints à temps. Qu’est-ce que le développement ? Serait-ce ces chiffres abstraits de croissance économique positive que l’on nous présente lors des conférences dans des salons huppés de la capitale ? Je préfère que l’on approche le développement un peu à la manière d’Amartya Sen qui nous donne une vision plus humaine du développement. Le développement doit être mesuré à la capacité des pauvres et des vulnérables à se prendre en charge et à être capables de changer leur futur. Il est donc extrêmement nécessaire que tout effort de développement soit basé sur le renforcement des capacités de ceux qui en ont le plus besoin.
2.Quelle lecture faites-vous de la Déclaration de Paris ?
La Déclaration de Paris est cet engagement des ministres des pays dits développés et sous-développés ainsi que des représentants des agences bilatérales et multilatérales de développement à respecter les concepts d’appropriation, d’alignement, d’harmonisation, de gestion pour les résultats et de rendre compte. Ces concepts sont intéressants et devraient a priori contribuer à une meilleure efficacité de l’aide. Toutefois, certaines faiblesses sont à noter. Il y a d’abord la quasi- absence de la Société civile dont les membres, censés représenter les principaux bénéficiaires, n’ont pas eu clairement voix au chapitre alors que c’est à eux que les gouvernements doivent rendre compte. La Déclaration n’a pas non plus de caractère coercitif et aucune sanction n’est prévue pour les pays qui ne respecteraient pas leur engagement. Il y a également le fait que les cibles à atteindre d’ici à 2010 sont toutes des indicateurs de mise en œuvre. Il n’est pas prévu dans la Déclaration, une mesure de l’impact sur les principaux bénéficiaires. Enfin, n’oublions pas qu’il s’agit d’une Déclaration qui est précédée par d’autres déclarations comme celles de Rome ou du consensus de Monterrey, par exemple, qui tardent encore à être totalement mis en œuvre.
3.Est-ce que la multiplication d’aide en République démocratique du Congo facilite le développement ?
Je crois que la multiplication d’aide ne devrait pas être un problème en soi. Personne ne trouve un problème à l’abondance des ressources. Encore, faut-il que ces ressources soient utilisées de façon optimale. D’abord, si les conditions sont trop compliquées, les organisations du pays n’auront pas accès à cette manne. Aussi une grande partie est-elle dirigée à des conférences, des consultations ou même donnée sous forme de réduction de la dette extérieure. On se retrouve parfois avec avec 30% des montants qui arrivent chez les principaux bénéficiaires. 4. Y-a-t-il d’autres mécanismes qui peuvent aider au développement ?
Tout à fait. Je citerais, par exemple, les initiatives en faveur du micro-crédit. Ces actions ont produit de bons résultats dans des pays comme l’Inde ou le Bangladesh. Il s’agit de faire bénéficier des prêts aux principaux concernés. Cela est souvent plus efficace, car on appuie des personnes dans leurs activités de tous les jours et pour lesquelles, elles ont déjà acquis de l’expertise. Aussi, du fait parfois qu’il s’agit de la seule opportunité que ces populations ont pour changer leur vie, elles s’y accrochent et font tout ce qui est possible pour réussir car l’avenir de leurs enfants en dépend.
5. Quelles seraient les perspectives d’avenir pour l’aide au développement ?
Elles sont multiples. On pourrait déjà chercher à concentrer les efforts de l’aide extérieure dans des secteurs précis et éviter du saupoudrage lorsque tout le monde veut tout faire. On devrait concentrer les efforts à renforcer et développer les capacités de nos systèmes nationaux et de notre société à jouer leur rôle de moteur du développement. On pourrait mettre en œuvre des stratégies innovatrices incluant par exemple des mécanismes de retour des cerveaux congolais qui ont décidé de travailler à l’étranger. Et puis, pourquoi ne pas arrêter carrément l’aide si on constate que ça ne marche pas. La porte reste ouverte à toutes les suggestions.
PROPOS RECUEILLIS PAR ALAIN NGULUNGU
Publications américaines (Notes de lectures)
L'Amérique et le monde. Quelle politique étrangère pour les Etats-Unis ?
Alain Ngulungu
23 Novembre 2009
Kinshasa — En lisant cette publication, l'on est loin de croire à « l'après l'empire », qu'annonçait en 2002, Emmanuel Todd. Deux spécialistes de politique extérieure des Etats-Unis (Zbigniew Brzezinski et Brent Scowcroft) viennent de redonner de l'espoir, à travers leurs analyses, à une nation affaiblie actuellement, les Etats-Unis, et les placent sur l'orbite de la relance.
Cet ouvrage démontre que la tâche, une année après la victoire symbolique de Barack Obama à la tête des Etats-Unis, est immense pour la nouvelle administration américaine. Consacrés superpuissance mondiale lors de la première guerre du Golfe en 1991, les Etats-Unis semblent avoir perdu confiance en eux-mêmes.
Après l'enlisement dans la guerre en Irak, les Etats-Unis s'étaient vu engluer dans une crise économique et financière dont ils étaient fortement tenus responsables. Ainsi, l'Amérique saura-t-elle conserver son hégémonie sur le reste du monde ? Répondent à cette question, deux éminentes figures de la politique étrangère américaine et non des moindres, Zbigniew Brzezinski, démocrate, et Brent Scowcroft, républicain, tous deux anciens conseillers à la Sécurité nationale sous différents gouvernements américains, tous deux opposants de la première heure à l'entrée en guerre contre l'Irak.
Ils avaient choisi, en pleine campagne électorale de 2008, de converser à bâtons rompus de l'avenir des Etats-Unis et des enjeux de politique étrangère avec David Ignatius, éditorialiste chez Washington Post.
Si l'élection de Barack Obama a créé une onde de choc mondiale et généré un enthousiasme qui ne connaît pas d'exception à l'échelle planétaire, il n'en demeure pas moins que le 44ème président soit à l'écoute de Zbigniew Brzezinski et Brent Scowcroft qui ont été au coeur du processus de décision de la politique étrangère des Etats-Unis, pour avoir été l'un et l'autre respectivement conseiller à la Sécurité nationale des présidents Carter (1978-1981) et Bush senior (1988-1991). Car ce sont des analystes particulièrement respectés tant dans leur pays qu'à l'étranger et des praticiens capables d'avoir une vision d'ensemble des questions stratégiques.
Actuellement, ils sont présentés comme étant proches de l'école réaliste des relations internationales. Ils réfutent une approche idéologique ou moraliste et partent de l'intérêt américain comme fondement de leurs analyses. Tous deux estiment, dans cet ouvrage, que la politique extérieure de George W. Bush, en portant atteinte au crédit moral des Etats-Unis, a affaibli leur prestige et leur puissance. En évoquant les défis à relever, Zbigniew Brzezinski dresse un bilan accablant de l'héritage diplomatique du prédécesseur d'Obama. Pour la première fois dans l'histoire, notent les auteurs, l'ensemble de l'humanité est politiquement active. La puissance dérive, en conséquence, de l'Atlantique à l'Asie.
Ensuite, les défis globaux à relever portent sur l'environnement, la lutte contre la pauvreté et l'injustice, et l'arrêt des humiliations ressenties par une partie de l'humanité. Et donc, affirmer, comme le faisait remarquer Bush, que la guerre contre le terrorisme sera le challenge idéologique du 21ème siècle est hors de propos.
Les deux interviewés s'accordent à reconnaître que la priorité de Barack Obama pendant son mandat sera le règlement du conflit israélo-palestinien.
Cet ouvrage pose la problématique fondamentale, celle de savoir comment les Etats-Unis sont arrivés là où ils sont aujourd'hui. Les vertus de l'ouverture, la politique de la dignité et les cent premiers jours du président, notamment ont été évoqués dans cet entretien avec David Ignatius.
Zbigniew Brzezinski et Brent Scowcroft (Entretiens dirigés par David Ignatius), L'Amérique et le monde. Quelle politique étrangère pour les Etats-Unis ? (Traduit de l'américain par Michel Bessières et Alii), Nouveaux Horizons, 2008, 308p.
Publications américaines (Notes de lectures)
A la maison blanche : quatre ans pour changer le monde
Dans cette publication, l’ancien président George Bush et Brent Scrowcroft, son conseiller à la sécurité nationale, nous font pénétrer dans les coulisses de l’histoire à partir de 1988 jusqu’en janvier 1993. En effet, certains des événements les plus décisifs du XXème siècle ont eu lieu pendant cette courte période comprise entre 1989 et 1991. Ces événements sont tous plus ou moins liés à la fin du dernier grand affrontement de ce siècle : la guerre froide.
Les deux auteurs ont assisté, depuis le bureau ovale, aux réunions de travail, aux sommets et conférences internationaux ainsi qu’aux tractations et aux affrontements entre les puissances qui ont entouré l’effondrement de l’Union soviétique, la chute du mur de Berlin et l’unification de l’Allemagne, la guerre du Golfe et les événements de la place Tienanmen.
Voici assortis dans cet ouvrage des portraits toujours vivants et, parfois, le récit des relations du président américain avec François Mitterrand, Mikhaïl Gorbatchev, Boris Eltsine, Margaret Thatcher et Helmut Kohl. L’on peut se poser la question de savoir comment George Bush a-t-il mis en place l’alliance contre Saddam Hussein et géré la guerre du Golfe ? Comment se sont déroulés les échanges intenses avec Pékin après Tienanmen ? Quelles négociations ont permis la réunification de l’Allemagne ? Quelle a été l’action des Etats-Unis au moment de l’effondrement de l’Union soviétique ?
Des faits qui ont changé le monde
Lors de l’Opération Tempête du désert, le 41ème président des Etats-Unis, George Bush, commente que la journée qui fit suite à la date limite était très étrange pour lui. Il lui revenait, sans cesse à l’esprit, que «leurs missiles et leurs avions s’apprêtaient à frapper Bagdad», certains étant déjà en route peut-être vers leurs cibles.
Brent Scowcroft relate, quant à lui, qu’assis dans son bureau en compagnie de Richard Haas et de Bob Gates, il regardait CNN lorsque la campagne aérienne débute. A dix-neuf heures précises, des explosions dues à des bombes envahissaient l’écran.
Aux événements de Tienanmen des 3 et 4 juin 1989 lorsque les troupes chinoises envahissent la place Tienanmen à Pékin, dispersant avec violence ce qui restait de quelques dizaines de milliers de manifestants qui l’occupaient depuis près d’un mois, le choc et la brutalité de cette action avaient suscité des vagues de protestations à travers le monde. Aux Etats-Unis, l’indignation était générale. George Bush parle ici de sa tournée en février 1990 en Chine et de sa rencontre avec le président Yang Shangkun.
Pour sa part, Brent Scowcrof note que, lors de l’effondrement de l’Union soviétique, 1990 était une année difficile pour Gorbatchev. Les problèmes se multipliaient : la mainmise du parti sur le pouvoir était menacée, et l’économie de plan ne s’adaptait aux bouleversements qui s’annonçaient, dit-il.
Au-delà des événements survenus en Europe de l’Est et en Allemagne, décrit Scowcroft, le nationalisme qui sévissait en Union soviétique exacerbait ses problèmes de sécurité et menaçait sa stabilité politique.
De son coté, Bush se disait pris entre deux feux : d’un côté, son désir de soutenir le droit des Baltes à l’autonomie, de l’autre la réalité de la situation. Selon lui, encourager la sécession, c’était courir un double risque : d’une part, celui d’une radicalisation militaire de la situation, résultat contraire à leurs vœux ; d’autre part, celui de faire reculer la cause de la liberté en Union soviétique.
Ce livre contient des révélations inédites. Il est un document exceptionnel sur l’exercice du pouvoir à la tête de la plus grande puissance mondiale.
George Bush & Brent Scowcroft, A la maison blanche : quatre ans pour changer le monde, Ed. Odile Jacob, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Christian Cler, Michèle Garène, Patrice Jorland et Sylvie kleiman-Lafon, Paris, 1999, 618 p.
Alain Ngulungu
Publications américaines (Notes de lectures)
Hillary Clinton : Histoire d’une ambition
Dans l’ouvrage «Hillary Clinton : Histoire d’une ambition», Jeff Gerth et Don Van Natta Jr, journalistes d’investigations à New York Times, dressent le parcours d’Hillary Rodham Clinton successivement Première dame des Etats-Unis, sénateur de l’Etat de New York et candidate à la présidence en 2008. Selon une certaine opinion, la véritable Hillary demeure une énigme. Icône des valeurs démocrates et du féminisme pour les uns et glaciale, maladroite et prête à toutes les manœuvres pour les autres.
Ce livre nourri, de sources inédites et de documents jusqu’ici confidentiels, éclaire sur la véritable histoire de l’actuelle secrétaire d’Etat américain, ancienne rivale aux primaires démocrates de Barack Obama.
Décortiquons ainsi les secrets de l’Hillaryland. «Mon équipe, se félicite Hillary pendant la campagne de 1992, peut se flatter de son sens de la discrétion, de la loyauté et de la camaraderie. Nous avons des règles à nous». Car elle avait remarquée qu’il y avait des fuites dans l’entourage de Bill. Ce feuilleton nous ramène en septembre 1970 lorsque le tout jeune couple se rencontre au cafeteria de la faculté de Droit de l’Université de Yale pour la première fois où Hillary «remarque un jeune homme grand et séduisant à la barbe aux reflets roux, la crinière de longs cheveux châtains en bataille s’adressant avec enthousiasme et énergie à un cercle admiratif d’étudiants».
Ce n’est pas ce jour qu’Hillary rencontre Bill. Il lui faudra attendre deux semestres, comme elle le révèle dans son autobiographie «Mon Histoire» publié en 2003. De l’automne au printemps, leurs regards se croisent souvent, longuement jusqu’à cette soirée où, dans la bibliothèque Hillary s’avance vers Bill, main tendue. Ebahi par son audace, ce dernier décide que c’est à lui de jouer le coup. C’est à partir de là que commence leur idylle. Leurs projets d’avenir se dévoilent lorsqu’un soir de printemps le couple Clinton discute, assis côte à côte tranquillement dans la cuisine d’une maison au bord d’une plage sur le Long Island Sound, à Milford (Connecticut). Hillary pense aux droits civiques et à la protection de l’enfance. Mais Bill, lui, sait exactement ce qu’il fera : «Il retournera en Arkansas pour se lancer dans la politique». L’ambition présidentielle du couple, «à tour de rôle» remonterait à cette période.
En effet, Bill et Hillary ont eu la vision de leur destin, il y a plus de trente ans, tout au début de leur relation amoureuse, peut-on lire dans ce livre. Ils ont échafaudé à cette époque un plan secret devenu le socle et le moteur de leur union : ils se sont juré «d’œuvrer ensemble à révolutionner le parti démocrate, et de s’installer à la Maison-Blanche». Quand la victoire de Bill a parachevé «ce plan de vingt ans,», leur ambition s’est encore accrue. Il serait président pendant huit ans, elle lui succéderait pendant huit ans. Ce pacte formidablement ambitieux, était resté secret jusqu’à ce que Barry, porté au bout de doigts suite aux vents de la crise financière et de deux guerres auxquelles l’Amérique a peur, vienne le déjouer.
Jeff Gerth & Don Van Natta: Hillary Clinton, Histoire d’une ambition, JC Lattès, traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Patrick Sabatier, 2008, 500 p.
Publications américaines (Notes de lectures)
«Les rêves de mon père » de Barack Obama» Dans «Les rêves de mon père», Barack Obama raconte son exceptionnel parcours. Celui d’un homme charismatique qui, le 4 novembre 2008, remporte l’élection présidentielle. Il incarne, désormais, depuis sa prise de fonctions le 20 janvier 2009 devant près de 2.000.000 de personnes, l’espoir et le renouveau pour des millions d’Américains. Obama raconte, avec franchise et sincérité, le fil de ses souvenirs. Des plages de Hawaii, où il vit avec sa mère blanche américaine, à Djakarta où il passe une partie de son enfance, des bancs de la prestigieuse université Columbia. Sectionné en 17 parties, cet ouvrage étale l’itinéraire de l’actuel occupant de la Maison Blanche. Quels ont été ses interrogations, ses victoires et ses défaites ? Près de dix ans après la première parution, la seconde entreprise d’écriture de cet ouvrage est encouragée par son éditeur. L’ancien sénateur de l’Illinois est parti d’une hypothèse simple, s’étant convaincu que l’histoire de sa propre famille et le récit de ses efforts pouvaient illustrer la séparation raciale qui a caractérisé l’histoire américaine, l’état fluctuant de l’identité et du choc des cultures : présenter la lutte en miniature. La lutte entre des mondes d’opulence et des mondes de pauvreté, entre les anciens et les modernes, entre ceux qui acceptent notre diversité et son foisonnement, ses heurts, ses frictions, tout en mettant en exergue l’ensemble des valeurs qui nous unissent... Barack serait peut-être le premier des présidents des Etats-Unis qui ait compris la misère en ces termes: «Je connais, je les ai vus, le désespoir et le désordre qui sont le quotidien des laissés-pour-compte, avec leurs conséquences désastreuses sur les enfants de la rue de Djakarta ou de Nairobi, comparables en bien des points à celles qui affectent les enfants du South Side de Chicago. Je sais, dit-il, combien est tenue pour eux la frontière entre l’humiliation et la fureur dévastatrice ; avec quelle facilité ils glissent dans la violence et le désespoir ; la réponse des puissants à ce désordre – qui alternent l’indifférence complaisante avec l’usage de la force aveugle, l’alourdissement constant des peines de prison et l’utilisation d’un matériel militaire plus sophistiqué dès que ledit désordre déborde des limites tolérées – est inadaptée. Plus intéressant, il reconnaît que «le durcissement des attitudes, l’expansion du fondamentalisme et du communautarisme nous menacent tous». Ce débat qui était plus intérieur et plus intime pour comprendre cette lutte, Obama l’érige en débat public auquel il s’engage professionnellement. Sûrement, ce débat influencera nos vies pour de nombreuses années, nous avise-t-il. Barack OBAMA, Les rêves de mon père, Nouveaux Horizons, Paris, 2008, 453 p. Traduit de l’anglais (USA) par Danièle Darneau Alain Ngulungu
L’intelligentsia congolaise dit non à la Balkanisation
Guerres ou paix en RDC ? - L’intelligentsia congolaise dit non à la Balkanisation |
Le groupe de presse Le Potentiel a, en collaboration avec l’IPRIS et International Crisis Group, organisé une conférence-débat le samedi 07 février à Fatima/Gombe avec comme thème : « RDC : La fin des guerres aux Kivu et perspectives d’avenir ?». |
Diaspora et société civile en RDC
Afrique du Sud: La Diaspora et la Société civile Congolaises sont dotées d'une synergie pour un changement radical
Alain Ngulungu
19 Février 2009
Kinshasa — La diaspora, comme le dit le poète Boniface Mongo Mboussa, «peut servir à la renaissance de l'Afrique». Celle de la RDC -au regard de la précarité de la situation politique et sécuritaire- en a heureusement, bien qu'en léger retard depuis l'organisation en 2008 de premières assises de Congolais de l'étranger, pris conscience.
En effet, l'Hotel Rosebank de Johannesburg a abrité du 14 au 15 Février 2009 un atelier organisé par le Forum des Organisations Congolaises en Afrique du Sud (FOCAS) en collaboration avec Kara Heritage Institute et Open Society Initiatives for Southern Africa (OSISA).
Réunissant de congolais venus de la RDC et de la diaspora (Afrique du sud, Belgique, Usa, Canada), l'atelier avait pour thème principal: «Leadership de la société civile en RDC. Rôle de la diaspora dans la consolidation de la paix et la reconstruction». Donner de la matière permettant à la diaspora congolaise afin de «participer efficacement au renforcement de la société civile congolaise à privilégier des moyens démocratiques dans la recherche de solution à la crise congolaise en toute son extension», était le leitmotiv principal de cet atelier.
Aussi, était-il question de sensibiliser la diaspora congolaise à privilégier de moyens démocratiques dans la recherche de solution à la crise congolaise. Car, il a été révélé que les différentes rébellions s'étaient servies en partie de la diaspora pour y recruter des officiers et soldats qui ont tué et violé leurs frères et soeurs et finalement détruit leur pays.
De brillantes analyses et réflexions ont été faites par les orateurs, notamment: «survol de la crise politique congolaise. De la dictature à la guerre de libération et de la guerre pour les élections à la guerre pour rien» du Prof. Ngoma Binda de l'Unikin (RDC); «Paix durable en RDC et intérêts des Etats de Grands lacs Africains.
Comment un peuple peut influencer un agenda de paix» du Prof. André Mbata Mangu de l'UNISA (Afrique du sud); «Rôle de la Diaspora Congolaise d'Afrique du Sud dans la Consolidation de la paix et la Reconstruction de la démocratie en RDC» du Prof. Kankwenda Mbaya de l'ICREDESA (Canada) ou encore l'intervention du Prof. Georges Nzongola-Ntalaja de l'Université de North Carolina at Chapell Hill (USA), etc.
Le débat, à cet effet, deux jours durant, avait mis à nu les défis ci-après: le danger imminent de balkanisation, l'irresponsabilité de la société civile, faiblesse du leadership politique, l'Etat en RDC est en faillite et n'est à mesure de répondre aux défis de la mondialisation et aux enjeux géopolitiques dans la région de Grands lacs et dans le monde.
A l'issue de cette rencontre de près de 100 participants, les Congolais ont accepté de mettre en place un réseau de solidarité de la société civile Congolaise mondiale pour mener des actions concertées pour la paix durable dans une démocratie participative et la reconstruction nationale en RDC.
C'est dans ce contexte qu'un travail est déjà entamé par le comité de suivi de l'atelier pour faciliter l'intégration des syndicats et organisations non gouvernementales de la société civile congolaise avec celles de la SADC, particulièrement des mouvements sociaux progressistes de l'Afrique du Sud comme COSATU, Kara Heritage Institute etc. Cela en vue d'une prise en charge de la lutte du peuple Congolais par d'autres peuples et Nations-frères.
Par ailleurs, les participants ont établi un «agenda stratégique de la paix en RDC». Ceci viendrait contredire les paix lénifiantes que proposent à la RDC, les plans Cohen, Sarkozy etc. Ils se sont engagés aussi à faire le monitoring des activités institutionnelles liées au processus de paix et de développement durable en RDC.
C'est ainsi que du côté gouvernement Congolais, ils ne demandent que celui-ci: exigela réparation et la prise en charge de victimes de guerres causées par les auteurs directs ou intellectuels, privés ou publics, étatiques ou multinationaux exploitant illégalement les ressources du peuple Congolais et contribuant à l'exacerbation de violence guerrières en RDC; plaide à l'établissement d'un tribunal international spécial ou mixte pour tous les graves crimes commis avant l'entrée en vigueur de la Cour Pénale Internationale, soit le 1er juillet.
A en croire François Butedi Nzolani, Directeur Exécutif Adjoint de FOCAS, un des organisateurs de l'atelier, il est donc plus urgent de créer si pas redynamiser la synergie entre la société civile et la diaspora congolaise en vue de perdurer les recommandations prises durant ces deux journées de randonnée congolaise en terre sud africaine, notamment: de créer une synergie entre la société civile et la diaspora congolaises et d'envisager un agenda pour la paix stratégique en RDC.
Interview de Geoffroy Matagne
Interviews
15.04.09 Le Potentiel : Cinq questions à Geoffroy Matagne
1. Vous avez participé à un séminaire d’information et d’appropriation de la décentralisation en RDC organisé à l’intention des Entités territoriales décentralisées (ETD). Quelles sont vos impressions sur le déroulement de ces assises ?
Ce séminaire a été organisé par la Cellule d’appui politologique en Afrique centrale (CAPAC) de l’Université de Liège en Belgique à la demande du ministre congolais de la Décentralisation avec l’appui de la région Wallonne. L’objectif était d’informer les acteurs locaux de nouvelles dispositions légales dans le domaine de la décentralisation. Ensuite, nous souhaitons établir un état de besoin des Entités territoriales décentralisées (ETD) à partir de nos discussions. Celles-ci ont été riches et nous réfléchissons maintenant sur la manière d’étendre ces expériences sur l’ensemble du territoire de la République démocratique du Congo. Enfin, nous allons étudier la création d’un centre d’appui et des ressources qui permettrait de rencontrer une série de besoins identifiés.
2. Le contexte de la décentralisation est marqué par la problématique du fameux 40% à rétrocéder aux provinces. Pensez-vous que les rapports, à l’heure actuelle, entre le pouvoir central et provincial sont au beau fixe ?
Le professeur Kumbu de l’Université de Kinshasa résume la décentralisation avec la formule suivante : décentralisation est égale à compétence plus ressources. Celles-ci sont indispensables pour mettre en oeuvre la décentralisation. Les 40% sont prévus dans la Constitution et les lois organiques pertinentes. En démocratie, ce qui compte, ce n’est pas que les relations soient au beau fixe. Car les conflits naissent toujours. Par contre, il importe de mettre en œuvre des mécanismes de résolution des conflits légaux et pacifiques prévus en particulier dans la Constitution.
3. Quelles sont les étapes à franchir pour permettre aux ETD d’être productives en assurant le bien-être de la population ?
Les ETD, pour être légitimes, doivent, d’une part, être élues et, d’autre part, assurer les responsabilités pour le bien-être de leurs populations en fonction de leurs compétences. L’élection est prévue mais elle doit encore être organisée. C’est une étape importante pour préparer le terrain. Les prochaines étapes seront notamment l’obtention des ressources financières suffisantes, l’amélioration des capacités de ressources humaines et l’identification des chantiers prioritaires au niveau communal. Les défis sont immenses.
4. Comment administrer une commune urbaine en République démocratique du Congo ?
Il est évidemment essentiel de pouvoir compter sur des ressources financières stables et prévisibles et sur les fonctions publiques locales compétentes et loyales. Il est donc capital d’être à l’écoute des besoins de la population qui jugera l’action des gouvernants locaux. L’élection ne fait pas la démocratie, mais le contrôle citoyen et la répétition des élections.
5. Quels sont les défis actuels qui restent pour le processus de la décentralisation en RDC ?
Dans la mise en œuvre de la décentralisation du gouvernement central, il convient encore d’adopter une série de législations organiques qui sont indispensables à la poursuite du processus constitutionnel. Il s’agit notamment de la loi financière qui assurera l’autonomie des provinces et des ETD ainsi que des lois qu’il faut encore adopter afin d’organiser des élections locales prévues par la Constitution en vigueur en RDC.
PROPOS RECUEILLIS PAR ALAIN NGULUNGU
Maître de conférences à l’Université de Liège et vice-président de l’Association belge des sciences politiques.